Sénégal: Décryptage – Plainte après les affrontements à Mbacké : Peut-on imputer la faute à Ousmane Sonko ?
Nonobstant l’interdiction du préfet de la ville de Mbacké, les leaders de la coalition Yewwi Askan Wi (Yaw), regroupés autour du leader du Pastef, Ousmane Sonko, ont vaillamment décidé de tenir le meeting qu’ils avaient prévu le vendredi 10 février dernier.
Après avoir réussi une mobilisation exceptionnelle dans le département de Keur Massar, le parti Pastef comptait remettre ça à Mbacké. Mais le préfet de ladite localité avait déclaré irrecevable la demande car elle était signée par 2 personnes au lieu de 3. Qualifiant cette décision de « honteuse », l’ancien député Ousmane Sonko a quand même décidé de maintenir sa manifestation.
« La forfaiture du préfet, auteur de cette décision, est choquante. En effet, en ouvrant les guillemets pour citer l’article 96 du Code pénal du Sénégal en vigueur comme base légale de « l’interdiction », le préfet du département de Mbacké, monsieur Amadoune Diop, a reproduit les dispositions non pas du Code pénal, mais celles de la loi n°74-13 du 24 juin 1974, d’ailleurs abrogée, dans ses dispositions contraires, par l’article 18 de la loi n°78-02 du 29 janvier 1978 relatives aux réunions. Cette forfaiture ne passera pas ! », avait fustigé Ousmane Sonko sur sa page Facebook.
Il a fallu l’arrivée de l’opposant à Mbacké pour que des confrontations entre les forces de l’ordre et les manifestants éclatent. Et lors de ces échauffourées, des actes de saccage ou de pillage contre une station Total, un magasin Orange et un supermarché Senchan, une chaîne de distribution alimentaire locale, ont été signalés, à cet effet.
Face à cette situation, Modou Bara Dolli a décidé de porter plainte contre Ousmane Sonko pour destruction de biens privés, selon la presse locale. Mais peut-on imputer la faute à Ousmane Sonko ? La question mérite d’être posée. Et Senenews a recueilli l’avis d’un juriste et d’un analyste politique.
« On pourrait avoir une réponse de Normand, ou à la Françoise Hollande (ni, ni). Grosso modo pour dire que la faute est partagée. Pour ma part, la faute est imputable au gouvernement. À chaque fois que l’opposition en général et le Pastef en particulier ont organisé des manifestations autorisées, il n’y a eu aucun débordement à déplorer. À l’inverse, et a contrario, à chaque interdiction s’en est suivie des heurts. Macky Sall le sait, et son ministre de l’intérieur est complice de ce climat. Ils ne souhaitent que le chaos soit pour déclarer le pays en état d’urgence (pouvoirs renforcés) soit pour repousser les élections présidentielles, ou les deux à la fois », a expliqué notre interlocuteur (analyste politique).
« Est-ce qu’il (Modou Bara Dolli) peut le prouver ? C’est une manifestation et il y a des échauffourées partout dans les manifestations. Et ce qui est grave pour ce Bara Dolli, il désigne une personne de droit pour dire ‘Monsieur un tel a détruit mon siège’. C’est ce qu’il a dit. Le tribunal a le droit de lui demander ‘avez-vous des preuves ? Avez-vous des témoins qui ont vu Sonko détruire ?’ C’est du dilatoire », a déclaré sur le sujet un avocat sous le couvert de l’anonymat.
Poursuivant son argumentaire, la robe noire a déclaré : « Bara Dolli sait pertinemment que cette plainte n’aboutira nulle part. Sonko n’ira pas au procès. Ce sont ses avocats qui vont partir. Et je pense que dans les conclusions de mes confrères, tout cela sera détaillé »…
Il convient de rappeler qu’au moment où ces lignes sont écrites, Ousmane Sonko est visé par quatre plaintes : celle d’Adji Sarr, de Mame Mbaye Niang, du policier Napel et récemment de Modou Bara Dolli.