Le Forum du Justiciable recadre les journalistes signataires d’une tribune contre le 3e mandat
La lecture de la pétition des 80 journalistes prenant position contre le 3e mandat montre l’urgence des assises de la presse et permet de comprendre pourquoi les activistes bousculent et se substituent de plus en plus aux journalistes dans l’espace public. Le journaliste avait l’avantage absolu de la crédibilité grâce à sa neutralité, à son objectivité mais aussi grâce sa connaissance des techniques de collecte et de traitement de l’information.
Ces techniques de collecte et de traitement de l’info permettaient de faire la différence entre information, opinion et rumeurs mais aujourd’hui force est de constater que le journalisme ce métier noble est entrain de dégénérer en activisme.
Signer une pétition contre le 3e mandat relève de l’opinion, pour ne pas dire de l’activisme qui doit être diffèrent du journalisme. L’activisme se fonde sur l’opinion, le journalisme sur les faits car on dit « les faits sont sacrés, le commentaire libre ». Dans les démocraties, il arrive tous les jours qu’un journaliste prenne position en signant un édito ou qu’un journal prenne position comme le New York Times pour Obama mais c’est la première fois dans l’histoire des médias et des démocraties qu’un groupe de journalistes fassent une pétition pour défendre une position politique.
En prenant position publiquement et collectivement position sur une question politique, ils perdent ainsi toute crédibilité pour s’exprimer sur la question parce l’analyse politique demande un minimum de neutralité et de distance. Il n’y a pas de différence entre les 80 journalistes et leurs anciens confrères de la Pravda soviétique car ils sont au service non pas des faits mais d’une opinion. Les 80 journalistes font une erreur d’optique parce qu’ils sont dans le média-centrisme. Il faut rappeler aux journalistes la division du travail démocratique. Aux journalistes d’informer, aux juges de veiller à la bonne application des lois et règlements, aux politiques de faire des propositions, à la société civile d’être les sentinelles de la démocratie et au peuple de trancher. A chacun son rôle.
Il ne peut y avoir de grande démocratie sans grande presse et cette pétition des journalistes (une exception sénégalaise) montre l’urgence des assises de presse parce qu’il est plus que temps de mettre un terme à cette confusion entre activisme et journalisme, cette amalgame permanente entre faits, commentaires et opinions personnelles. Si certains journalistes n’avaient pas une posture d’activiste, beaucoup, d’excès dans l’affaire Sonko/Adji Sarr auraient été évités. Last but not least, il est fort surprenant, que les 80 journalistes n’aient pas eu un mot pour condamner ou à la limite s’émouvoir de l’incendie du CESTI.
Fait à Dakar, le 25 juin 2023
Le bureau Exécutif