« J’ai un sentiment de dégout face à ce qui me semble être un acharnement sur la personne d’Ousmane Sonko »

Entretien avec Mamadou Badiane, Coordonnateur du Grand Parti à Pikine

Le coordonnateur du Grand Parti à Pikine, Mamadou Gainde Badiane est en phase avec les jeunes de cette formation politique qui ont pondu un communiqué pour déconseiller à Malick Gakou de répondre à l’appel du Président Macky Sall. Selon lui, « Le Président Macky Sall n’a aucune considération pour la classe politique » et que les jeunes du du GP ont compris que cet appel n’est pas sincère. Dans cet entretien, Mamadou Badiane a par ailleurs, brossé les grandes lignes du Programme Alternatif Suxali Sénégal (PASS) avant d’exprimer sa révulsion sur le procès en diffamation opposant Ousmane Sonko à Mame Mbaye Niang. 

Pourquoi les jeunes du Grand Parti ont déconseillé à Malick Gakou de répondre favorablement à l’appel au dialogue du Président Macky Sall ?

Le social est un espace intrinsèquement conflictuel, mais le lieu aussi où peut être garanti l’accès de chacun à la considération. Le Président Macky Sall n’a aucune considération pour la classe politique, pour qui il a toujours eu comme ambition de réduire à sa plus simple expression. Les jeunes du GP ont compris que l’appel du Président n’est pas sincère pour plusieurs raisons. On peut en évoquer d’abord les relents de chantage derrière cet appel. Je cite le Président Macky Sall à propos de l’éligibilité de Karim Wade et de Khalifa Sall : « (…) J’ai appelé à un dialogue, rien ne m’oblige à le faire, je le fais parce que j’imagine que si on le fait d’autres voies vont s’ouvrir pour permettre à certains de pouvoir participer. Si je n’organise pas ce dialogue, certains ont beau dire qu’ils sont candidats, mais ils ne pourront jamais l’être (…). » Autrement dit Karim Meissa Wade et Khalifa Ababacar Sall n’ont qu’à venir dialoguer avec moi, s’ils veulent être éligibles.

Quid de la participation du Président Macky, de sa troisième candidature aux élections de 2024 ?  Les jeunes du GP ont certainement compris que le Président voulait demander, en langage codé, à son opposition de venir valider, légitimer son projet de troisième candidature en contrepartie, il permettrait leur éligibilité par l’amnistie. Une amnistie qui coûterait, par ricochet, au contribuable sénégalais l’absolution d’une mal gouvernance financière qui a occasionné la prédation de leurs ressources, un deal scandaleux.

Ensuite, il en a fait autant pour le parrainage en demandant à l’opposition de le rejoindre autour de la table de négociation pour qu’il puisse enfin accéder à leur vieille doléance qui leur avait valu, à pratiquement tous, 24 heures de geôles. Un appel au dialogue qui n’est rien d’autre qu’une VDL une Voie de Contournement de la Loi sur le dos du peuple sénégalais. Les positions de Khalifa SAall et de Karim Wade sont mues uniquement par la levée de leur inéligibilité. Cet appel au dialogue du Président Macky SALL aura au moins le mérite de dévoiler enfin le vrai visage de son fameux GLORIA. La jeunesse du Grand Parti a parfaitement raison. Le Président Malick Gakou, par principe, ne peut pas se permettre de dealer sur le dos du peuple sénégalais. Le Président Macky Sall ne sera pas candidat.

Pensez-vous que le dialogue est agité pour diviser l’opposition ?

J’en ai la conviction. Cet appel au dialogue commence déjà à produire les germes de la division dans l’opposition. L’opposition parlementaire majoritaire est en train d’être fissurée à cause d’une divergence de positions. L’esprit de Yewwi Askan Wi, par exemple, risque d’en pâtir. Yewwi Askan Wi, par conviction et contractuellement, ne peut pas poser des actes qui renforceraient, politiquement, le Président Macky Sall. Le mot d’ordre demeure le respect scrupuleux de la loi fondamentale, en son article 27, donc le départ du Président Macky Sall à la fin de son mandat en cours. Ceci devrait être, à la limite, le préalable à toute concertation avec le pouvoir.  L’existence est pour les humains une angoisse, celle d’une confrontation d’avance perdue avec la réalité pour laquelle ils ne sont pas armés. La posture de Taxawu Sénégal renseigne, à bien des égards, sur la complexité de la réalité surtout politique. Avec cet appel au dialogue, le Président Ousmane Sonko saura qu’en politique tout ce qui brille n’est pas de l’or. Le Président Malick Gakou reste convaincu de la nécessité de resserrer les rangs au sein de la coalition YAW pour triompher face à ce régime fossoyeur de l’économie nationale.

En 2019, le candidat Gakou n’avait pas franchi l’étape du parrainage. Est-ce qu’il n’est pas plus pertinent de prendre part au dialogue afin de revoir le système de parrainage ?

Absolument pas, l’impertinence de cette loi, nous n’avons sans cesse arrêté de l’évoquer. Pour rappel, en 2019 nous considérions déjà que le candidat Gakou avait bel et bien passé l’étape du parrainage. Lors du premier dépôt le conseil nous avait notifié 8888 doublons internes et externes à changer. Après une deuxième vérification, il nous avait à nouveau notifié environ 400 doublons sur 796 parrains en remplacement. Ce qu’ils nous ont illégalement et injustement refusé car la loi sur le parrainage ne précise pas le nombre de fois qu’il est possible de changer de doublons.

Ceci dit, le 09 avril 2019, nous avions tous passé la nuit au commissariat central à cause de cette loi qui viole le droit de libre participation aux élections. Une violation qui a été confirmée par un arrêt rendu le 28 avril par la cour de justice de la CEDEAO. Cette loi n’est rien d’autre qu’un filtre à candidats que le président Macky SALL utilise à sa guise pour des calculs politiciens.  Nous n’accepterons pas de plier à ce chantage politique pour la suppression de cette loi. Mieux sa suppression devrait aussi être un autre préalable pour un quelconque dialogue.

La bipolarisation de l’espace politique (Sonko/Macky) ne vous désavantage pas ?

Pas du tout, il en a été toujours ainsi dans l’espace politique national de (Senghor/Lamine Gueye) en passant par (Abdou Diouf/Abdoulaye Wade). Je ne le vois pas comme un désavantage mais plutôt comme un supplément de motivations. Une source d’énergie, cet élan qu’il faut pour refaire le retard. Nous sommes convaincus que Malick Gakou sera le 5éme Président du Sénégal. Nous y croyons et travaillons pour son élection. Je félicite au passage l’honorable député Maire Ahmed Aidara pour son travail remarquable, en qualité de directeur de campagne. Nous voulons constituer une troisième voie pour accéder au pouvoir. Le Président Gakou a démarré la tournée YOONU PASS-PASS ou le chemin de l’engagement qui le mènera partout dans le pays et à l’international.

Qu’est-ce que votre candidat propose pour mériter le suffrage des sénégalais ?

Le Président du Grand Parti propose le Programme Alternatif Suxali Sénégal (PASS) au peuple sénégalais. Ce projet de société cimente notre compagnonnage avec le candidat El hadji Malick Gakou. Un projet qui expose au peuple, aux électeurs la vision de notre candidat pour le Sénégal de demain. Il affirme la priorité au respect des droits fondamentaux du citoyen : droits à une vie conforme à la dignité humaine, au travail, à une sécurité sociale, à la santé, au logement, à la sécurité, à l’épanouissement culturel et social, à l’enseignement et à un environnement sain. L’objectif ultime de son projet est de transformer notre pays en un havre de paix, de cohésion sociale et de bien-être. Permettez que je reprenne, in-extenso, les notes conclusives de son pacte de confiance et de développement : « Le Programme Alternatif Suxxali Senegaal (PASS) que nous proposons au Peuple sénégalais porte des réformes et mesures d’envergure, relatives à la relance de la croissance dans tous les secteurs, à l’amélioration de la gouvernance administrative, politique et judiciaire et à la promotion du Développement Humain Durable.

Des objectifs précis seront visés dans des domaines essentiels tels que : l’emploi des jeunes, l’éradication de la pauvreté, l’alimentation et l’autosuffisance alimentaire, la santé et le bien-être, l’éducation, la valorisation de la dimension culturelle et sportive, l’égalité des sexes et la promotion des activités de production de la femme, l’accès aux services sociaux, l’assainissement, l’environnement et l’amélioration du cadre de vie, etc.

Notre coalition politique reconnait qu’elle devra promouvoir une gouvernance vertueuse pour atteindre les résultats escomptés. Elle doit éviter le clientélisme politique et s’appuyer sur une bonne compréhension des aspirations des sénégalais, de leurs droits et obligations.

L’Etat doit susciter le consensus national autour de l’action publique afin de maintenir un équilibre continu entre les pouvoirs, la gestion du développement durable et le partage des fruits de la croissance, les acquis de la société et les obligations d’une gestion saine et transparente des affaires publiques. Il doit promouvoir la confiance, renforcer sa capacité à servir les citoyens et soutenir un processus durable de développement permettant d’éradiquer la pauvreté dans notre chère patrie. »

Le procès en appel du leader du parti Pastef, Ousmane Sonko s’ouvre ce lundi 08 mai. Quelle lecture avez-vous de ce dossier ?

L’instruction de ce procès en première instance et le verdict qui en avait découlé avaient suscité beaucoup d’interrogation sur notre système judiciaire, sa fiabilité et l’indépendance de nos magistrats. Une situation qui questionne fondamentalement le principe de la séparation des pouvoirs dans notre architecture institutionnelle. J’ai un sentiment de dégout face à ce qui me semble être un acharnement sur la personne du leader de Pastef. De prime abord, ce qui me révulse c’est que Sonko soit l’énième leader politique qui a maille à partir avec la justice et avec comme enjeu principal son éligibilité pour les prochaines échéances électorales. Dans cette affaire de diffamation, le ministère public a, si je ne m’abuse, interjeté appel. J’aimerais connaitre où se situent véritablement les intérêts de la société dans ce procès. Le nœud gordien du dossier des domaines agricoles communautaires demeure l’utilisation qui a été faite des 29 milliards du contribuable sénégalais. Le saccage des deniers publics constitue le principal frein à l’exécution normal de nos politiques publiques. Le ministère public aurait dû s’autosaisir depuis longtemps pour l’application de la loi au nom des intérêts de la société qui.

Ce procès et celui qui va suivre le 16 mai présentent pour le Grand Parti et son leader Malick Gakou, le même tableau représentatif d’une démocratie et d’un Etat de droit en déliquescence depuis l’avènement du Président Macky Sall. Un combattant qui choisit l’arme et l’adversaire au combat ne fait peur à personne. Le Grand Parti et son Président seront du côté de la vérité, auprès du peuple.

Comment comptez-vous vous battre contre la 3éme candidature de Macky SALL ?

Je pense qu’il nous faudrait battre le fer pendant qu’il est chaud, le modeler pour en faire une arme de destruction de sa candidature. En effet, nous devons absolument empêcher Macky Sall de déposer sa candidature autrement nous aurons échoué. Robert BADINTER disait à François MITTERRAND, lors de son investiture à la tête du conseil constitutionnel français : « Mr François MITTERRAND, mon ami merci de me nommer président du conseil constitutionnel, mais sachez que dès cet instant, envers vous, j’ai un devoir d’ingratitude. »

Oui le devoir d’ingratitude parce que le conseil constitutionnel est et doit rester un contre-pouvoir au pouvoir qui le nomme. Nous ne devons pas accepter que Macky SALL dépose une troisième candidature pour les échéances de 2024. Il faut éviter à nos juges constitutionnels de faire prévaloir leur devoir d’ingratitude à l’égard de Macky qui les a nommés et octroyés beaucoup de privilèges.

Ici et maintenant, si par extraordinaire, nous ne parvenons pas à empêcher ce dépôt illégitime de candidature, je veux mettre nos juges devant leurs responsabilités historiques. Ils sont presque tous au crépuscule de leur vie et carrières. Une bonne et belle occasion se présente pour eux d’entrer au Panthéon pour avoir mérité une reconnaissance nationale.

Autrement, nous nous battrons, avec les forces vives (F24), par tous les moyens légaux et politiques dont nous disposons.

Cheikh Makhfou Diop

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