Affaire Sweet beauté : Mamour Diallo, celui par qui le scandale arrive

Le nouveau directeur général de l’Office National de l’Assainissement du Sénégal (ONAS) est-il le scénariste ou le réalisateur du film tourné au salon de massage sweet beauté SPA ? Son nom est cité à hue et à dia par les différents acteurs de cette affaire. A couteaux tirés avec leader du parti Pastef dans l’affaire des 94 milliards, Mamour Diallo est cité dans ce dossier de mœurs comme étant celui qui tirait les ficelles en coulisse de la « marionnette » Adji Sarr, pour se venger d’Ousmane Sonko qui l’accusait d’avoir détourné 94 milliards.

Dans le huis clos du dossier Sweet Beauty, du nom du salon de massage où travaillait la jeune Adji Sarr jusqu’au jour de sa plainte pour viols et menaces de mort contre l’opposant Ousmane Sonko en février 2021, un protagoniste improbable se retrouve désormais sur la sellette.

Ancien directeur des Domaines, président du mouvement politique Dolly Macky et candidat malheureux à la mairie de Louga aux locales de janvier 2021, Mamadou Mamour Diallo est devenu, à son corps défendant, un « témoin important » dans ce dossier judiciaire qui, depuis plus de deux ans, tient en haleine tout un pays

Des enregistrements controversés

Au début du mois d’avril, un enregistrement audio fuitait sur les réseaux sociaux : Mamour Diallo en pleine conversation privée avec Adji Sarr, ensuite quelques mois plus tard s’en suivra la pluie d’enregistrements des discussions entre la jeune masseuse et son marabout Baye Mbaye MC. Dans la première conversation, l’homme tente de rassurer la jeune fille dépassée par la tournure des événements : « Nous ne t’abandonnerons jamais, tu es notre fille. Je ne te promets pas la lune, mais je ferai ce que je t’ai dit : après le procès [contre Ousmane Sonko], je te ferai confectionner un passeport [diplomatique] pour que tu quittes le pays. Je l’ai dit et je vais le faire. Mais dans l’état actuel du dossier, on ne peut pas te faire ce passeport. Même l’État ne peut pas le faire », confie-t-il. Devant le Doyen des juges, Maham Diallo, Adji confirme l’authenticité des audios de Baye Mbaye Niass.

Faut-il y voir un deal entre ce prétendu bienfaiteur et celle qui se présente comme une victime d’Ousmane Sonko ? Est-ce une façon d’inciter la jeune femme à livrer de fausses accusations en échange d’une protection et d’un soutien de la mouvance présidentielle, voire de l’État ?

Au sein de la classe politique, le rôle joué par Mamour Diallo dans cette affaire est diversement interprété. Dans les premières heures de cette histoire, il n’est pas cité nommément, mais les indices donnés l’impliquent déjà : « Un cadre de la mouvance présidentielle à Louga, qui savait qu’Ousmane Sonko fréquentait ce salon de massage a manipulé Adji Sarr afin de monter un dossier contre lui », avait confiait un collaborateur d’un leader de l’opposition.

Le 1er mars 2022, c’est un proche du président Macky Sall qui corroborait cette version, tout en considérant que des relations sexuelles contraintes avaient bien pu avoir lieu entre Ousmane Sonko et Adji Sarr. Notre interlocuteur assurait que Mamour Diallo avait orchestré la plainte initiale de la jeune femme.

« Assouvir une vengeance »

« La personne qui a fait assister Adji Sarr est Mamour Diallo, l’ancien directeur des Domaines. Il cherchait à assouvir une vengeance contre Ousmane Sonko », indiquait cette source, ajoutant : « Mamour Diallo s’est rué sur cette affaire, qu’il a découverte sur le tard, afin de briser Sonko. C’est lui qui a poussé la fille à porter plainte. »

La vengeance évoquée par notre interlocuteur serait, à l’en croire, liée à une affaire qui défraie la chronique depuis plusieurs années. En l’occurrence, un litige portant sur un titre foncier convoité, dans le cadre duquel Ousmane Sonko  qui avait alors crié au scandale – et Mamour Diallo, à la tête des Domaines à l’époque, se sont retrouvés face à face. Le premier accusant le second d’escroquerie sur les deniers publics à hauteur de 94 milliards de F CFA. Et Mamour Diallo demandant réparation pour diffamation et injures publiques.

Pour l’heure, la justice a rendu une ordonnance de refus d’informer à la suite de la plainte d’Ousmane Sonko – un jugement confirmé en appel. Et l’affaire fait toujours l’objet d’un pourvoi en cassation. En 2019, une commission d’enquête parlementaire avait en outre, blanchi Mamour Diallo.

Ce conflit entre les deux hommes aurait-il été à l’origine, quelques années plus tard, d’une cabale judiciaire ? Bien qu’appartenant à des camps politiques différents, nos deux sources s’accordent sur un point : la « machination » supposée autour de cette affaire n’exonère pas pour autant Ousmane Sonko des accusations de viol pesant sur lui. « Mais lorsque le président Macky Sall a été informé de cette histoire et du rôle prêté à Mamour Diallo, il est tombé des nues », précise l’un de nos interlocuteurs.

Fake news ou deep Fake

Me El Hadj Diouf, l’un des avocats d’Adji Sarr, écarte quant à lui la thèse du complot. Dans, ses multiples sorties médiatiques l’avocat déclarait : « Je ne sais pas si [cet enregistrement] est authentique mais c’est un fake news. Avec les nouvelles technologies, tout est possible. » Considérant le buzz médiatique autour de cette captation clandestine comme « une diversion », ce ténor du barreau ajoutait : « Dans l’enregistrement en question, rien ne prouve qu’il y a eu complot contre Ousmane Sonko. »

A supposer qu’Adji Sarr ait enregistré Mamour Diallo à son insu, pourquoi aurait-elle laissé fuiter une conversation qui jette le doute sur son propre témoignage, alors que son statut d’accusatrice lui vaut déjà d’être clouée au pilori par les partisans de ce dernier ? Quoi qu’il en soit, alors que les auditions sont bouclées après de longs mois de stagnation de l’instruction, les avocats d’Ousmane Sonko comptent bien se tirer de cette péripétie ultra médiatisée, la preuve d’une cabale judiciaire contre le président du Pastef-Les Patriotes. « La défense entend faire poursuivre les personnes impliquées dans le complot ayant abouti à cette accusation ridicule de viol, assure Me Bamba Cissé (avant l’envoi du dossier en chambre criminelle). Et tous les éléments ont déjà été recueillis pour asseoir l’existence d’un complot, qui n’est plus contestable. » De son côté, Mamour Diallo n’a pas donné suite à nos sollicitations d’avoir sa version ou de répondre à toutes ces accusations portées sur sa personne. Le renvoi du dossier devant la chambre criminelle serait-il le clap de fin de ce film ? Wait and see

Quotidien, LE REGARD 

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